Famille(s), je vous hais : le droit face aux nouveaux modes de famille

LE DROIT EN PRATIQUE

« Nous avons besoin d’un nouveau pacte de famille » Me Jean Gasté, notaire à Nantes, Président du 121è Congrès des notaires (2025)

Quel est le thème de ce prochain congrès, et pourquoi ce choix ?

« Familles et créativité notariale, accompagner les tribus d’aujourd’hui » : ce congrès qui aura lieu en septembre 2025 est une réponse à celui de 1999 qui s’intitulait « Demain la famille ». En une génération, nous sommes passés du singulier au pluriel, de l’unicité à la pluralité des modes de familles. Le choix du mot « tribus » en est l’illustration sociologique.

Comment définiriez-vous la famille de 2024, 50 ans après celle de 1974 ?

Ce demi-siècle a vu se développer l’individualisme. Pour autant, la famille n’a pas disparu, elle a simplement évolué en même temps que la société : PACS, mariage sans distinction de sexe, démocratisation du concubinage et, surtout, famille choisie versus famille subie. Le Covid a accéléré cette transition : beaucoup d’entre nous, coupés de tout lien social, ont redécouvert le bonheur d’avoir une famille et ont recréé un vivre-ensemble de leur propre initiative. Ces liens d’affection voulus ont été accentués d’une part par la loi relative à la bioéthique de 2021, qui évoque le « projet parental », et d’autre part par l’internationalisation de la cellule familiale : confronté à un éclatement géographique, l’individu recherche le plus petit dénominateur commun pour recréer du lien.

« La famille n’a pas disparu, elle a évolué en même temps que la société »
Comment le droit peut-il s’adapter à ces nouvelles formes de famille ?

Nous avons besoin des nouveaux pactes de famille, avec de grandes règles fixées par la loi mais adaptées par les familles. Laisser cette autonomie aux parties est un point essentiel au regard du nombre de configurations familiales possibles : une famille recomposée dont le père a deux enfants d’une première union ne peut pas être soumis aux mêmes mécanismes de droit qu’un couple homosexuel dont l’un n’a pas d’enfant… Et si, à sa mort, il décidait de transmettre un héritage aux enfants de son compagnon ? La souplesse et la recherche de l’intérêt collectif sont des enjeux majeurs dans les études notariales. De son côté, la loi pourrait créer et encadrer de nouvelles communautés de vie, de nouvelles tribus.

Comment voyez-vous la famille en 2074, dans 50 ans ?

Une famille très internationale, sans frontières, en accord avec la devise de l’union européenne : unis dans la diversité.

Propos recueillis par C. R.

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